Avis relatif à la publication générale des comptes des partis et groupements politiques au titre de l'exercice 2016

JurisdictionFrance
Publication au Gazette officielJORF n°0066 du 20 mars 2018
Date de publication20 mars 2018
CourtCOMMISSION NATIONALE DES COMPTES DE CAMPAGNE ET DES FINANCEMENTS POLITIQUES
Record NumberJORFTEXT000036719966


Délibéré par la commission en sa séance du 7 février 2018


La commission a présenté dans ses précédents rapports d'activité les conclusions de ses analyses sur le financement des partis politiques. Elle a ainsi rappelé et précisé son rôle en la matière. Le présent avis s'inscrit dans la continuité de ces réflexions.


La législation relative au financement de la vie politique a été modifiée en 2017 par les lois n° 2017-286 du 6 mars 2017 tendant à renforcer les obligations comptables des partis politiques et des candidats et n° 2017-1339 du 15 septembre 2017 pour la confiance dans la vie politique.
Ainsi, la loi n° 88-227 du 11 mars 1988 relative à la transparence financière de la vie politique prévoit désormais :
- une information plus grande des donateurs lors des appels de fonds ;
- l'indication des informations relatives aux emprunts et aux flux financiers avec les candidats au sein des annexes aux comptes des partis politiques ;
- la possibilité de recourir à un seul commissaire aux comptes pour les partis politiques ayant des ressources inférieures à 230 000 euros ;
- la possibilité pour la CNCCFP de prononcer des sanctions allant jusqu'à 1 à 3 ans en cas de non-respect des obligations légales par les partis politiques.
Depuis le 1er janvier 2018, la loi du 11 mars 1988 prévoit également :
- la perception par les mandataires de l'ensemble des ressources des partis politiques ;
- de nouvelles sanctions pénales en cas de non-respect de certaines obligations prévues par ses articles 11-4 et 11-7 ;
- une nouvelle définition du périmètre comptable ;
- un encadrement des prêts de personnes physiques et morales.


I. - LES OBLIGATIONS COMPTABLES DES PARTIS POLITIQUES
A. - La définition du parti politique


Ni la Constitution ni la loi n'ont défini de façon précise la notion de parti politique. L'article 4 de la Constitution dispose qu'ils « concourent à l'expression du suffrage » et « se forment et exercent leur activité librement ». La loi n° 88-227 du 11 mars 1988 modifiée relative à la transparence financière de la vie politique se limite à reconnaître que « [les partis politiques] jouissent de la personnalité morale ((1)) ».
Cette absence de définition est source de difficultés dès lors qu'il s'agit de fixer des principes et des règles de financement des partis politiques, et en particulier lorsqu'il s'agit de déterminer le champ d'application d'une loi sur le financement.
C'est pourquoi le Conseil constitutionnel et le Conseil d'Etat sont venus, par une jurisprudence concordante, apporter des critères de définition de la notion de parti politique comme il suit. Au sens de la loi n° 88-227 du 11 mars 1988 précitée, est considérée comme parti politique la personne morale de droit privé qui s'est assigné un but politique :


- si elle est éligible à l'aide publique (articles 8 et 9 de la loi du 11 mars 1988) ou si elle a régulièrement désigné un mandataire (articles 11 à 11-7) ; et
- si elle a déposé des comptes certifiés par un ou deux commissaires aux comptes auprès de la CNCCFP (article 11-7).


Tout groupement qui s'est assigné un but politique et qui est éligible à l'aide publique, soit a désigné pour recueillir l'ensemble de ses ressources un mandataire (une personne physique déclarée à la préfecture ou une association de financement agréée par la CNCCFP) jouit de la personnalité morale en application de l'article 7 de la loi du 11 mars 1988 et doit déposer chaque année à la CNCCFP ses comptes certifiés. Bénéficier du statut d'association déclarée n'est donc pas une condition pour relever de la loi du 11 mars 1988, même si ce statut est le plus souvent choisi par les partis politiques.
Le montant de l'aide publique affecté au financement des partis et groupements politiques est inscrit dans le projet de loi de finances et fait l'objet d'une répartition par décret. Ce montant est divisé en deux fractions égales :


- une première fraction destinée au financement des partis et groupements en fonction de leurs résultats aux élections à l'Assemblée nationale (avec des dispositions particulières pour les partis présentant des candidats exclusivement outre-mer) ;
- une seconde fraction spécifiquement destinée au financement des partis et groupements représentés au Parlement.


L'aide attribuée à un parti politique bénéficiaire de la première fraction peut être l'objet d'une modulation financière en cas de non-respect de la parité entre les candidats.
La seconde fraction de ces aides est attribuée aux partis et groupements politiques éligibles à la première fraction proportionnellement au nombre de membres du Parlement qui ont déclaré au bureau de leur assemblée, au cours du mois de novembre, y être inscrits ou s'y rattacher.
En outre, un parlementaire élu dans une circonscription qui n'est pas comprise dans le territoire d'une ou plusieurs collectivités d'outre-mer ne peut pas se rattacher à un parti qui n'a présenté des candidats que dans une ou plusieurs collectivités d'outre-mer.
Enfin, le rattachement des parlementaires pour l'attribution de la seconde fraction de l'aide publique est disponible sur le site internet des deux assemblées.


B. - Les obligations comptables du parti politique et leurs conséquences


A titre liminaire, il convient de souligner qu'aux termes de l'article 25 II de la loi n° 2017-1339 du 15 septembre 2017 pour la confiance dans la vie politique, les dispositions de l'article 11-7, dans sa rédaction résultant de l'article 25 I 12° de cette même loi, ne s'appliqueront qu'à compter du premier exercice des partis ou groupements politiques ouvert postérieurement au 31 décembre 2017.
Ainsi, les obligations légales des partis et groupements politiques au titre de l'exercice 2016, objet du présent avis, sont régies par l'article 11-7 dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2017-1339 du 15 septembre 2017 précitée.
L'obligation de dépôt de comptes certifiés à la commission constitue l'aboutissement d'obligations comptables plus larges.
En application de l'article 11-7 de la loi n° 88-227 du 11 mars 1988 relative à la transparence financière de la vie politique, les partis ou groupements bénéficiaires de tout ou partie des dispositions des articles 8 à 11-4 doivent :


- tenir une comptabilité retraçant tant les comptes du parti ou groupement politique que ceux des organismes, sociétés ou entreprises dans lesquels le parti ou groupement politique détient la moitié du capital social ou la moitié des sièges de l'organe d'administration, ou exerce un pouvoir prépondérant de décision ou de gestion ;
- arrêter leurs comptes chaque année au 31 décembre ;
- les faire certifier par deux commissaires aux comptes si les ressources annuelles du parti dépassent 230 000 euros ou par un seul commissaire aux comptes si les ressources du parti sont inférieures à ce seuil ;
- les déposer au plus tard le 30 juin de l'année suivante à la CNCCFP qui assure leur « publication sommaire » au Journal officiel.


Cette comptabilité doit respecter les prescriptions de l'avis n° 95-02 du Conseil national de la comptabilité relatif à la comptabilité des partis et groupements politiques qui portent notamment sur la présentation et l'élaboration des comptes d'ensemble.
Par ailleurs, il ressort de l'avis du 28 novembre 2011 du Haut Conseil du commissariat aux comptes (H3C) (2) que l'ensemble des normes d'exercice professionnel sont applicables aux commissaires aux comptes des partis et groupements politiques. En outre, les commissaires aux comptes disposent pour l'exercice de leur mission d'un avis technique du 17 avril 2012 de la Compagnie nationale des commissaires aux comptes relatif à la mission des commissaires aux comptes dans les partis et groupements politiques entrant dans le champ d'application de la loi n° 88-227 du 11 mars 1988 modifiée.
Au-delà de la publication des comptes, la commission doit s'assurer du respect par les partis politiques de leurs obligations de dépôt des comptes telles que prévue par l'article 11-7 précité. Pour ce faire, la loi n° 2013-907 du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique autorise la commission à obtenir, le cas échéant, communication de toutes les pièces comptables et de tous les justificatifs nécessaires au bon accomplissement de sa mission de contrôle.
Si le contrôle des pièces comptables des partis politiques est à la charge des commissaires aux comptes dans le cadre de leur mission de certification des comptes, la vérification des obligations légales des partis par la commission peut également se faire au regard des pièces comptables réclamées.
Ainsi, dans le cadre de l'instruction des comptes portant sur l'exercice 2016, la commission a demandé des pièces comptables et des justificatifs aux partis politiques pour lesquels elle estimait que les comptes d'ensemble déposés nécessitaient une information supplémentaire dans 37 cas.
Peuvent être considérés comme n'ayant pas respecté leurs obligations légales, les partis politiques qui n'auraient pas déposé leurs comptes dans le délai fixé par la loi, qui auraient déposé des comptes non certifiés, qui auraient fait l'objet d'un refus de certification par les commissaires aux comptes et tous les partis pour lesquels la commission aurait constaté des comptes comportant une incohérence manifeste ou un périmètre comptable incomplet au regard des obligations prévues à l'article 11-7 de la loi du 11 mars 1988.
Le constat par la commission du respect ou du non-respect des obligations légales détermine les partis politiques qui sont susceptibles de bénéficier ou non pour l'avenir des dispositions de la loi du 11 mars 1988 à savoir :


- l'aide publique directe si le parti y est éligible ;
- la dispense du contrôle de la Cour des comptes dans le même cas (3) ;
- le droit à la réduction d'impôt prévue au 3 de l'article 200 du code général des impôts ;
- le droit de financer une campagne électorale ainsi qu'un autre parti politique.


En ce qui concerne le dernier point, la jurisprudence administrative (4) a précisé à plusieurs reprises que les partis...

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