Avis relatif à la publication générale des comptes des partis et groupements politiques au titre de l'exercice 2018

JurisdictionFrance
Publication au Gazette officielJORF n°0039 du 15 février 2020
Record NumberJORFTEXT000041579954
CourtCOMMISSION NATIONALE DES COMPTES DE CAMPAGNE ET DES FINANCEMENTS POLITIQUES
Date de publication15 février 2020


Délibéré par la commission en sa séance du 20 janvier 2020


La commission a présenté dans ses précédents rapports d'activité les conclusions de ses analyses sur le financement des partis politiques. Elle a ainsi rappelé et précisé son rôle en la matière. Le présent avis s'inscrit dans la continuité de ces réflexions.


I. - LES PARTIS POLITIQUES ET LEURS OBLIGATIONS LÉGALES
A. - La définition du parti politique


Ni la Constitution ni la loi n'ont défini de façon précise la notion de parti politique. L'article 4 de la Constitution dispose qu'ils « concourent à l'expression du suffrage » et « se forment et exercent leur activité librement ». La loi n° 88-227 du 11 mars 1988 modifiée relative à la transparence financière de la vie politique se limite à reconnaître que « [les partis politiques] jouissent de la personnalité morale (1) ».
Cette absence de définition est source de difficultés dès lors qu'il s'agit de fixer des principes et des règles de financement des partis politiques, et en particulier lorsqu'il s'agit de déterminer le champ d'application d'une loi sur le financement.
C'est pourquoi le Conseil constitutionnel et le Conseil d'Etat sont venus, par une jurisprudence concordante, apporter des critères de définition de la notion de parti politique comme il suit. Au sens de la loi n° 88-227 du 11 mars 1988 précitée, est considérée comme parti politique la personne morale de droit privé qui s'est assigné un but politique :


- si elle est éligible à l'aide publique (articles 8 et 9 de la loi du 11 mars 1988) ou si elle a régulièrement désigné un mandataire (articles 11 à 11-7) ; et
- si elle dépose des comptes certifiés par un ou deux commissaires aux comptes auprès de la commission (article 11-7).


Tout groupement qui s'est assigné un but politique et qui, soit, est éligible à l'aide publique, soit, a désigné pour recueillir l'ensemble de ses ressources un mandataire (une personne physique déclarée à la préfecture ou une association de financement agréée par la commission) jouit de la personnalité morale en application de l'article 7 de la loi du 11 mars 1988 et doit déposer chaque année à la commission ses comptes certifiés. Bénéficier du statut d'association régie par la loi de 1901 n'est donc pas une condition pour relever de la loi du 11 mars 1988, même si ce statut est le plus souvent choisi par les partis politiques.
Le montant de l'aide publique affecté au financement des partis et groupements politiques est inscrit dans le projet de loi de finances et fait l'objet d'une répartition par décret. Ce montant est divisé en deux fractions égales :


- une première fraction destinée au financement des partis et groupements en fonction de leurs résultats au premier tour des élections à l'Assemblée nationale (avec des dispositions particulières pour les partis présentant des candidats exclusivement outre-mer) ;
- une seconde fraction spécifiquement destinée au financement des partis et groupements représentés au Parlement.


L'aide attribuée à un parti politique bénéficiaire de la première fraction fait l'objet d'une modulation financière en cas de non-respect de la parité entre les candidats. En outre, les voix des candidats déclarés inéligibles sont déduites pour le calcul du montant de la première fraction de l'aide publique.
La seconde fraction de ces aides est attribuée aux partis et groupements politiques éligibles à la première fraction proportionnellement au nombre de membres du Parlement qui ont déclaré au bureau de leur assemblée, au cours du mois de novembre, y être inscrits ou s'y rattacher.
En outre, un parlementaire élu dans une circonscription qui n'est pas comprise dans le territoire d'une ou plusieurs collectivités d'outre-mer ne peut pas se rattacher à un parti qui n'a présenté des candidats que dans une ou plusieurs collectivités d'outre-mer.
Enfin, le rattachement des parlementaires pour l'attribution de la seconde fraction de l'aide publique est disponible sur le site internet des deux assemblées.


B. - Les obligations légales des partis politiques


Aux termes de l'article 25 II de la loi n° 2017-1339 du 15 septembre 2017 pour la confiance dans la vie politique, les dispositions de l'article 11-7, dans sa rédaction résultant de l'article 25 I 12° de cette même loi, s'appliquent à compter du premier exercice des partis ou groupements politiques ouvert postérieurement au 31 décembre 2017. Les comptes de l'exercice 2018 sont, en conséquence, les premiers comptes déposés à la commission soumis aux dispositions nouvelles de la loi pour la confiance dans la vie politique et des textes qui en ont découlé.
Ainsi, en application de l'article 11-7 de la loi n° 88-227 du 11 mars 1988 modifiée relative à la transparence financière de la vie politique, les partis ou groupements bénéficiaires de tout ou partie des dispositions des articles 8 à 11-4 doivent :


- tenir une comptabilité selon un règlement établi par l'Autorité des normes comptables (ANC) ;
- tenir une comptabilité qui retrace tant les comptes du parti ou groupement politique que ceux de tous les organismes, sociétés ou entreprises dans lesquels le parti ou groupement détient la moitié du capital social ou des sièges de l'organe d'administration ou exerce un pouvoir prépondérant de décision ou de gestion ;
- tenir une comptabilité qui inclut les comptes des organisations territoriales du parti ou groupement politique dans des conditions définies par décret ;
- arrêter leurs comptes chaque année ;
- les faire certifier par deux commissaires aux comptes si les ressources annuelles du parti dépassent 230 000 euros ou par un seul commissaire aux comptes si les ressources du parti sont inférieures ou égales à ce seuil ;
- transmettre, dans les annexes de ces comptes, les montants et les conditions d'octroi des emprunts souscrits ou consentis par eux, l'identité des prêteurs ainsi que les flux financiers avec les candidats tenus d'établir un compte de campagne en application de l'article L. 52-12 du code électoral ;
- les déposer au plus tard le 30 juin de l'année suivante à la commission qui les rend publics et assure leur publication au Journal officiel.


Cette comptabilité doit pour la première fois respecter les prescriptions du règlement n° 2018-03 du 12 octobre 2018 relatif aux comptes d'ensemble des partis ou groupements politiques qui portent notamment sur l'établissement et la présentation des comptes d'ensemble.
Le règlement de l'ANC n° 2018-03 a été homologué par arrêté du 26 décembre 2018 publié au Journal officiel du 30 décembre 2018. Ce document a une valeur réglementaire et s'applique aux comptes d'ensemble des partis ou groupements politiques afférents aux exercices ouverts à compter du 1er janvier 2018. Il s'agit d'un changement de méthode comptable.
L'avis technique relatif à la mission des commissaires aux comptes dans les partis et groupements politiques entrant dans le champ d'application de la loi n° 88-227 du 11 mars 1988 a été mis à jour par la Compagnie nationale des commissaires aux comptes en mai 2019 à la suite de l'homologation du nouveau règlement comptable. Cet avis technique porte notamment sur les missions et les aspects particuliers de l'audit mis en œuvre dans le cadre de la certification des comptes d'ensemble des formations politiques.
Par ailleurs, il ressort de l'avis du 28 novembre 2011 du Haut Conseil du commissariat aux comptes (H3C) (2) que l'ensemble des normes d'exercice professionnel sont applicables aux commissaires aux comptes des partis et groupements politiques.
La commission doit, en application de l'article 11-7 de la loi du 11 mars 1988 précitée, s'assurer du respect par les partis politiques des obligations prévues au même article. Ainsi, lorsque le législateur décide de renforcer les obligations prévues à l'article 11-7 précité, comme cela a été le cas à l'occasion de la loi n° 2017-1339 du 15 septembre 2017 pour la confiance dans la vie politique, la commission doit vérifier le respect de ces nouvelles obligations, ce qui de facto augmente les cas pour lesquels elle est susceptible de constater le non-respect d'une obligation légale par un parti politique.
Jusqu'à présent, pouvaient être considérés comme n'ayant pas respecté leurs obligations légales, les partis politiques qui ne déposaient pas leurs comptes dans le délai fixé par la loi, qui déposaient des comptes non certifiés ou qui faisaient l'objet d'un refus de certification par les commissaires aux comptes et tous les partis pour lesquels la commission constatait des comptes certifiés avec un périmètre comptable incomplet. S'ajoutait à cette liste, le cas envisagé par le Conseil d'État (CE, 9 juin 2010, Assoc. Cap sur l'avenir 13, req. n° 327423), celui de comptes certifiés déposés mais comportant une incohérence manifeste.
Il convient désormais d'ajouter les partis politiques qui ne respecteraient pas les nouvelles obligations issues de la loi pour la confiance dans la vie politique en présentant :


- des comptes non établis et présentés conformément au règlement comptable de l'ANC ;
- des comptes dont le périmètre n'inclurait pas les comptes des organisations territoriales du parti ;
- des comptes dont l'annexe ne mentionnerait pas les montants et les conditions d'octroi des emprunts souscrits ou consentis, l'identité des prêteurs ainsi que les flux financiers avec les candidats tenus d'établir un compte de campagne en application de l'article L. 52-12 du code électoral.


Le constat par la commission du respect ou du non-respect des obligations légales détermine les partis politiques qui sont susceptibles de bénéficier ou non pour l'avenir des dispositions de la loi du 11 mars 1988 à savoir :


- l'aide publique directe si le parti y est éligible ;
- la dispense du contrôle de la Cour des comptes dans le même cas (3) ;
- le droit à la réduction d'impôt prévue au 3 de l'article 200 du code général des impôts pour les dons et cotisations ;
- le droit de financer une campagne électorale ainsi qu'un autre parti politique.


En ce qui concerne le dernier point...

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