Décision du 4 juin 2004 se prononçant sur un différend qui oppose la société Clariant Huningue à la SAEML Hunélec relatif aux conditions financières d'acheminement de l'énergie électrique pour son usine de fabrication de produits chimiques

JurisdictionFrance
Publication au Gazette officielJORF n°185 du 11 août 2004
Record NumberJORFTEXT000000787028
Date de publication11 août 2004
CourtCOMMISSION DE REGULATION DE L'ENERGIE
Enactment Date04 juin 2004


La Commission de régulation de l'énergie,
Vu la demande de règlement de différend, enregistrée le 9 avril 2004 sous le numéro 04-38-05, présentée par la société Clariant Huningue, société par actions simplifiées, immatriculée au registre du commerce et des sociétés de Mulhouse sous le numéro B 302 305 529, dont le siège social est situé 45, avenue de Bâle, 68330 Huningue, prise en la personne de son représentant légal, M. Renaud Spitz, ayant pour conseil M. Jean Lhoiry, président de la société Experts en tarification de l'énergie (ETE), 38660 Le Touvet.
La société Clariant Huningue a saisi la Commission de régulation de l'énergie du différend qui l'oppose à la SAEML Hunélec sur les conditions financières d'acheminement de l'énergie électrique pour son usine de fabrication de produits chimiques de Huningue (Haut-Rhin).
Elle soutient qu'en omettant de l'avertir de son intention d'appliquer un tarif d'acheminement de l'énergie électrique différent de celui publié par Electricité de France, la société Hunélec n'a pas négocié de bonne foi et a abusé de sa situation de monopole, en méconnaissance des dispositions de l'article 20.2 de la directive 96/92/CE du 19 décembre 1996 et du dernier alinéa de l'article 1er de la communication de la Commission de régulation de l'énergie du 18 mai 2000. La société Clariant Huningue considère qu'en augmentant unilatéralement le tarif d'acheminement, la société Hunélec a cherché à la pénaliser pour avoir fait jouer la concurrence, ce qui constitue une violation du 2° du II de l'article 2 de la loi du 10 février 2000 modifiée, qui interdit toute discrimination pour l'accès aux réseaux publics de transport et de distribution.
La société Clariant Huningue considère que le surcoût qui lui a ainsi été imposé n'est pas justifié dans son principe, dès lors qu'il appartenait à la société Hunélec, conformément aux dispositions combinées du 2° du II de l'article 2 et du II de l'article 5 de la loi du 10 février 2000, de saisir le fonds de péréquation de l'électricité si elle estimait que le barème transitoire d'Electricité de France ne couvrait pas les coûts de transport jusqu'à son site industriel. Elle soutient que le barème spécifique mis en place par la société Hunélec doit être regardé comme inapplicable, quelle que soit la date à laquelle il a été déposé auprès de la Commission de régulation de l'énergie et de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes. La société Clariant Huningue rappelle à ce titre qu'avant la loi du 10 février 2000, les dispositions combinées de l'ordonnance du 1er décembre 1986, du décret du 29 juillet 1988 et de l'arrêté du 17 février 1993 interdisaient de pratiquer des tarifs supérieurs à ceux d'Electricité de France. Elle indique que depuis la loi du 10 février 2000 et avant la publication du décret du 26 avril 2001, aucun barème spécifique ne pouvait être appliqué, le premier alinéa du II de l'article 4 de la loi précitée ne prévoyant pas de calcul réseau par réseau. Elle estime, enfin, qu'après la publication du décret du 26 avril 2001, et en l'absence de décret fixant les premiers tarifs d'utilisation des réseaux publics de transport et de distribution d'électricité, la société Hunélec n'avait pas le droit d'appliquer son barème.
La société Clariant Huningue soutient, en outre, que le montant du surcoût est injustifié, alors que les décrets du 29 juillet 1988 et du 26 avril 2001 sont très précis sur les paramètres de tarification et qu'en l'espèce, en raison de leur proximité avec le poste mixte, les coûts réels liés à la desserte de ses installations sont inférieurs au coût moyen d'un client national pour lequel le tarif transitoire RSTA est applicable.
La société Clariant Huningue demande à la Commission de régulation de l'énergie :
- de dire que la société Hunélec ne pouvait pas légalement mettre en place et appliquer un barème transitoire d'acheminement de l'énergie électrique supérieur à celui publié par Electricité de France pour la période du 1er novembre 2001 au 31 octobre 2002 ;
- de dire que les factures payées à la société Hunélec du 1er novembre 2001 au 31 octobre 2002 devront être régularisées sur la base du barème transitoire RSTA publié par Electricité de France et que le surcoût, soit 75 000 euros hors taxes, devra lui être remboursé majoré des intérêts au taux légal depuis le 1er novembre 2001.


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Vu les observations en défense, enregistrées le 6 mai 2004, présentées par la société Hunélec, en sa qualité de gestionnaire du réseau public de distribution, société anonyme d'économie mixte locale (SAEML), inscrite au registre du commerce et des sociétés de Mulhouse sous le numéro TI B 377 817 473, dont le siège social est situé à l'hôtel de ville, 2, rue de Saint-Louis, 68330 Huningue, représentée par son directeur général, M. Benoît Kirba.
La société Hunélec indique avoir mis en place, avant l'entrée en vigueur du décret du 19 juillet 2002, un tarif spécifique tenant compte de ses coûts de distribution, parce que le barème transitoire d'Electricité de France ne lui permettait pas de couvrir ses charges. Elle assure ne s'être jamais écartée des dispositions réglementaires dans l'élaboration et la diffusion de ses tarifs et rappelle n'avoir reçu aucune observation des pouvoirs publics sur cette question.
Elle fait remarquer que les particularités historiques du site industriel de la société Clariant Huningue ont conduit à l'adoption de solutions d'alimentation sécurisées, qui ont longtemps satisfait les deux parties, et qu'il convient de tenir compte de ce contexte. La société Hunélec précise s'être toujours attachée à justifier le bien-fondé de ses positions, dont la légalité et la légitimité lui paraissent incontestables, et considère que la société Clariant Huningue ne saurait prétendre avoir subi la moindre discrimination.
La société Hunélec soutient que le barème transitoire contesté a été adopté pour éviter tout amalgame entre les activités d'acheminement et celles de fourniture et qu'il a été appliqué de façon non discriminatoire à tout client éligible. Elle ajoute que ce barème reflétait exactement ses coûts, les calculs étant menés par niveau de tension selon une logique de péréquation géographique et non sous la forme d'un coût marginal d'alimentation de la société Clariant Huningue. La société Hunélec considère que sur la période transitoire 2000-2002 l'ouverture du marché a profité à la société Clariant Huningue qui a bénéficié, en exerçant son éligibilité, d'une baisse sensible de ses charges d'électricité.
Elle soutient que la société Clariant Huningue n'est pas fondée à remettre en cause sa bonne foi dans le cadre des négociations relatives à la fourniture d'énergie, alors que la réglementation issue de la loi du 10 février 2000 n'imposait pas de négocier le tarif d'accès, qui devait simplement refléter les coûts de chaque distributeur avant d'être fixé au plan national par le décret du 19 juillet 2002.
La société Hunélec soutient que la société Clariant Huningue fait une fausse interprétation de la communication de la Commission de régulation de l'énergie du 18 mai 2000, qui ne concerne pas les tarifs de transport, mais les négociations sur les contrats des clients éligibles. Elle soutient que la société Clariant Huningue ne saurait invoquer la moindre discrimination, dans la mesure où elle était, à l'époque où ont été établies les factures, la seule à avoir exercé son éligibilité et se trouvait ainsi dans une situation différente de celle des autres clients de son réseau. Elle fait remarquer qu'en communiquant le décompte précis de ses charges, elle s'est conformée aux dispositions de la loi du 10 février 2000, selon lesquelles le tarif doit refléter l'ensemble des coûts de distribution. Elle ajoute que, si en 2000 elle s'en est tenue au tarif provisoire d'Electricité de France qui n'avait aucune force légale, ce n'est qu'afin de disposer du temps nécessaire pour élaborer son propre tarif.
Elle considère que la société Clariant Huningue ne saurait prétendre qu'il lui appartenait de saisir le fonds de péréquation de l'électricité prévu au II de l'article 5 de la loi du 10 février 2000 si le barème transitoire d'Electricité de France ne couvrait pas l'ensemble de ses coûts, alors que ces dispositions renvoient au péage, et non à un quelconque tarif provisoire, et que son tarif reflétait précisément ses coûts. Elle indique avoir déposé son tarif auprès de la Commission de régulation de l'énergie, de la direction du gaz, de l'électricité et du charbon ainsi que de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, le 30 octobre 2001.
La société Hunélec considère qu'en vertu des dispositions des premier et deuxième alinéas...

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