Décision n° 2011-0893 du 26 juillet 2011 se prononçant sur une demande de règlement de différend opposant les sociétés France Télécom et Free Infrastructure

JurisdictionFrance
Publication au Gazette officielJORF n°0199 du 28 août 2011
Date de publication28 août 2011
Enactment Date26 juillet 2011
CourtAUTORITE DE REGULATION DES COMMUNICATIONS ELECTRONIQUES ET DES POSTES
Record NumberJORFTEXT000024508767


L'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes ;
Vu la directive 2002/21/CE du Parlement européen et du Conseil du 7 mars 2002 relative à un cadre réglementaire commun pour les réseaux et services de communications électroniques (directive « cadre ») ;
Vu la directive 2002/19/CE du Parlement européen et du Conseil en date du 7 mars 2002 relative à l'accès aux réseaux de communications électroniques et aux ressources associées, ainsi qu'à leur interconnexion (directive « accès ») ;
Vu la recommandation de la Commission européenne du 20 septembre 2010 sur l'accès réglementé aux réseaux d'accès de nouvelle génération (ci-après « recommandation NGA ») ;
Vu le code des postes et des communications électroniques (ci-après CPCE), notamment ses articles L. 32-1, L. 33-6, L. 34-8, L. 34-8-3, L. 36-8, R. 9-4 et R. 11-1 ;
Vu la décision n° 2009-1106 de l'Autorité en date du 22 décembre 2009 précisant, en application des articles L. 34-8 et L. 34-8-3 du code des postes et des communications électroniques, les modalités de l'accès aux lignes de communications électroniques à très haut débit en fibre optique et les cas dans lesquels le point de mutualisation peut se situer dans les limites de la propriété privée ;
Vu le règlement intérieur de l'Autorité, modifié par la décision n° 2010-1354 de l'Autorité en date du 16 décembre 2010 ;
Vu la décision n° 2011-0846 de l'Autorité en date du 21 juillet 2011 se prononçant sur une demande de règlement de différend opposant les sociétés Free Infrastructure et France Télécom ;
Vu la demande de règlement de différend enregistrée à l'Autorité le 1er avril 2011, présentée par la société France Télécom, société anonyme au capital de 10 595 434 424 euros, immatriculée au registre du commerce et des sociétés de Paris sous le numéro 380 129 866, dont le siège social est situé 6, place d'Alleray, 75505 Paris Cedex 15, représentée par M. Eric Debroeck, en sa qualité de directeur des affaires réglementaires ;
La société France Télécom demande à l'Autorité d'enjoindre à la société Free Infrastructure de modifier dans un délai d'un mois :
― les dispositions de son contrat « Mutualisation de Ligne FttH à partir d'un PM de Grande Capacité (PMGC) », ci-après « contrat PMGC », afin de prévoir la prise de rendez-vous et la réalisation du raccordement palier par l'opérateur commercial ;
― les dispositions de son contrat « Cession d'un droit d'usage sur un bouquet de fibres dédiées », ci-après « contrat fibres dédiées », afin de prévoir la prise de rendez-vous et la réalisation du raccordement palier par l'opérateur commercial ;
― les dispositions de son contrat « Offre de Mutualisation de Ligne FttH à partir d'un PM de Grande Capacité (PMGC) » afin de prévoir la mise à disposition du brassage PMGC (raccordement de la ligne optique du client au réseau FttH de France Télécom) avant la réalisation du raccordement palier par l'opérateur commercial.
Sur la recevabilité de la saisine et la compétence de l'Autorité, la société France Télécom soutient que :
― les contrats de mutualisation conclus entre Free Infrastructure et France Télécom portent sur une prestation d'accès dont elle précise les conditions techniques et économiques ;
― l'Autorité est compétente pour régler le présent litige qui s'inscrit dans le cadre de l'exécution de la convention prévue à l'article L. 34-8-3 du CPCE ;
― le refus de Free Infrastructure de négocier des évolutions de ses contrats de mutualisation conduit à un échec des négociations au sens de l'article L. 36-8 du CPCE.
Sur ses demandes relatives aux modalités de raccordement palier prévues par les contrats de mutualisation de la société Free Infrastructure, la société France Télécom soutient que :
Les modalités de raccordement de Free Infrastructure ne sont pas raisonnables dans la mesure où :
― elles permettent à Free Infrastructure de s'immiscer dans la relation commerciale de l'opérateur commercial avec son client ;
― elles impliquent un double rendez-vous pour le client final. Ce dernier doit piloter lui-même la livraison de son raccordement ;
― les résultats de la réalisation par Free Infrastructure du raccordement palier sont mauvais (dysfonctionnement) et France Télécom a dû en conséquence suspendre la commercialisation de son offre ;
― elles constituent un frein au déploiement de la concurrence ;
― Free en tant qu'opérateur commercial ne subit pas ces inefficacités (traitement discriminatoire).
Ses demandes sont légitimes puisque :
― le raccordement palier est essentiellement un acte commercial ;
― la fourniture d'une prestation d'installation est essentielle ;
― l'opérateur commercial doit pouvoir maitriser la qualité de service de ses offres de détail.
Ses demandes sont raisonnables dans la mesure où :
― elles sont compatibles avec l'article R. 9-4 du CPCE qui prévoit la possibilité pour l'opérateur d'immeuble de mandater un tiers pour réaliser les travaux ;
― elles sont compatibles avec le principe de responsabilité de l'opérateur d'immeuble. En effet, ce dernier peut dans le cadre d'un contrat de sous-traitance exercer une action contre l'opérateur commercial en cas de dommage ;
― il n'existe pas de risque pour l'intégrité du réseau car l'opérateur d'immeuble peut, dans le cadre de son contrat de sous-traitance, sécuriser les modalités de raccordement en encadrant l'action de l'opérateur commercial par des spécificités techniques ;
― pour le « contrat fibres dédiées », Free Infrastructure a introduit dans le contrat la possibilité pour l'opérateur commercial de demander à réaliser lui-même le raccordement palier ;
― elles permettent de résoudre l'ensemble des dysfonctionnements constatés.
Sur ses demandes relatives à la réalisation du brassage au PMGC, dans le cadre du « contrat PMGC », la société France Télécom soutient que :
― l'opération de brassage étant postérieure à la pose de la PTO, ceci interdit de facto de tester la continuité optique du client avec le réseau FttH de France Télécom à la suite de la pose de la PTO ;
― l'opération de brassage ayant lieu au plus sous 72 heures ouvrées après la pose de la PTO, ceci implique une double intervention chez le client : la première pour la pose de la PTO par l'opérateur d'immeuble et la seconde avec le fournisseur pour l'installation des équipements.
Vu le courrier du directeur des affaires juridiques de l'Autorité en date du 8 avril 2011 transmettant aux parties le calendrier prévisionnel de dépôt des mémoires et désignant les rapporteurs ;
Vu les observations en défense enregistrées à l'Autorité le 2 mai 2011, présentées par la société Free Infrastructure, société par actions simplifiée au capital de 1 000 000 euros, immatriculée au registre du commerce et des sociétés de Paris sous le numéro 488 095 803, dont le siège social est situé 8, rue de la Ville-l'Evêque, 75008 Paris et, représentée par M. Cyril Poidatz, en sa qualité de président ;
La société Free Infrastructure demande à l'Autorité :
― de déclarer irrecevable la saisine de l'Autorité par France Télécom ;
― de rejeter l'ensemble des demandes de France Télécom au titre de cette saisine.
Concernant l'irrecevabilité des demandes de France Télécom et l'incompétence de l'Autorité, Free Infrastructure soutient que :
― la saisine de l'Autorité par France Télécom sur la base de l'article L. 36-8 du CPCE est irrecevable au motif qu'aucun échec des négociations ne peut être constaté puisqu'aucune négociation commerciale n'a eu lieu, à défaut pour France Télécom d'entamer toute démarche pour l'ouverture d'une telle négociation ;
― dans le cadre de la construction, les articles L. 33-6, R. 9-2 à R. 9-4, L. 36-6 et L. 36-8 du CPCE ne donnent pas compétence à l'Autorité pour préciser, compléter ou modifier les règles relatives à la construction et par conséquent, la construction du raccordement palier relevant de la construction des lignes à très haut débit et non du régime de l'accès aux lignes, la demande de France Télécom relative à la construction du raccordement palier est irrecevable ;
― au vu des dispositions de l'article R. 9-4 du CPCE, les conditions de réalisation des raccordements palier relèvent de la seule liberté de l'opérateur d'immeuble et non de la compétence de l'Autorité, rendant, en conséquence, irrecevable la demande de France Télécom que l'Autorité impose à l'opérateur d'immeuble de confier la réalisation du raccordement palier à l'opérateur commercial.
Concernant le défaut de justification des demandes de France Télécom, Free Infrastructure soutient que :
― en l'absence d'une exécution significative du « contrat PMGC » (France Télécom n'a commandé que 62 accès) et de toute exécution du « contrat fibres dédiées », France Télécom ne dispose pas d'un recul suffisant pour estimer que les offres de Free Infrastructure ne permettent pas de produire des accès très haut débit ;
― France Télécom n'a pas un besoin impératif d'aller chez ses abonnés pour activer des accès très haut débit dans les immeubles de Free Infrastructure alors même que France Télécom ne permet pas aux opérateurs alternatifs d'intervenir sur la boucle locale cuivre qui est un réseau mutualisé ;
― la mise en place d'un outil de prise de rendez-vous est complexe et, en conséquence, il ne peut être demandé à Free Infrastructure de mettre en place immédiatement un tel outil alors que France Télécom a mis 7 ans pour mettre en place un outil symétrique sur le cuivre ;
― la demande de brassage étant justifiée par France Télécom par le fait que l'opérateur commercial doit pouvoir installer et mettre en service les équipements chez son client final concomitamment à la réalisation du raccordement palier par l'opérateur commercial, cette demande est sans objet.
Concernant le caractère déraisonnable de la demande de France Télécom de réaliser les raccordements palier, Free Infrastructure soutient que :
― Free Infrastructure est irréductiblement responsable vis-à-vis des bailleurs et copropriétaires et détient la responsabilité contractuelle du choix de ses...

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