Décision no 2000-441 DC du 28 décembre 2000

JurisdictionFrance
Publication au Gazette officielJORF n°303 du 31 décembre 2000
Record NumberJORFTEXT000000220899
Date de publication31 décembre 2000
CourtCONSEIL CONSTITUTIONNEL
Enactment Date28 décembre 2000

Le Conseil constitutionnel, saisit de recours dirigés contre la loi de finances rectificative, a invalidé totalement ou partiellement les dispositions suivantes :
Sur l'article 3
L'article 3 de la loi déférée affecte au fonds de financement de la réforme des cotisations patronales de sécurité sociale le reliquat du droit de consommation sur les tabacs manufacturés perçu par l'Etat au titre de l'année 2000.
Selon les sénateurs requérants, l'article 3 ne respecterait pas les dispositions de l'article LO 111-3 du code de la sécurité sociale dans la mesure où il méconnaîtrait le champ respectif des lois de finances et des lois de financement de la sécurité sociale, "une loi de finances ne pouvant modifier une mesure contenue dans une loi de financement de la sécurité sociale".
La Haute juridiction considère "qu'aux termes du deuxième alinéa du II de l'article LO 111-3 du code de la sécurité sociale : " Seules les lois de financement peuvent modifier les dispositions prises en vertu des 1° à 5° du I " ; que cette dernière disposition a pour objet de faire obstacle à ce que les conditions générales de l'équilibre financier, telles qu'elles résultent de la loi de financement de la sécurité sociale de l'année, modifiée, le cas échéant, par des lois de financement rectificatives, ne soient affectées par l'application de textes législatifs ou réglementaires dont les incidences sur les conditions de cet équilibre, dans le cadre de l'année, n'auraient pu au préalable être appréciées et prises en compte par une des lois de financement susmentionnées" ; "que le transfert du reliquat du produit du droit de consommation sur les tabacs du budget de l'Etat vers le fonds de financement de la réforme des cotisations patronales de sécurité sociale est évalué à trois milliards de francs ; que ce transfert affecterait les conditions générales de l'équilibre financier de la sécurité sociale pour l'année 2000, alors qu'aucune loi de financement de la sécurité sociale n'a pris en compte cette incidence et qu'aucune ne pourra plus le faire d'ici à la fin de l'exercice ; qu'il convient à cet égard de relever que le IX de l'article 16 de la loi du 23 décembre 2000 susvisée de financement de la sécurité sociale pour 2001 rend seulement applicable, dès le 1er janvier 2000, l'affectation des droits sur les boissons au fonds de financement de la réforme des cotisations patronales de sécurité sociale".
Par conséquent, la Haute juridiction déclare l'article 3 non conforme à la Constitution comme contraire aux dispositions de l'article LO 111-3 du code de la sécurité sociale.
Sur l'article 37
Le I de l'article 37 de la loi déférée étend la taxe générale sur les activités polluantes instituée à l'article 266 sexies du code des douanes à l'électricité et aux produits énergétiques fossiles ; il fixe l'assiette, le barème, les cas d'exonération et les modalités de recouvrement de cette taxe.
Les deux saisines font notamment grief à ces dispositions de porter atteinte à divers titres au principe d'égalité devant l'impôt.
La Haute juridiction considère que, "conformément à l'article 34 de la Constitution, il appartient au législateur de déterminer, dans le respect des principes constitutionnels et compte tenu des caractéristiques de chaque impôt, les règles selon lesquelles doivent être assujettis les contribuables ; que le principe d'égalité ne fait pas obstacle à ce que soient établies des impositions spécifiques ayant pour objet d'inciter les redevables à adopter des comportements conformes à des objectifs d'intérêt général, pourvu que les règles qu'il fixe à cet effet soient justifiées au regard desdits objectifs" ; "qu'il ressort tant de l'exposé des motifs de la loi déférée que des débats parlementaires à l'issue desquels a été adopté l'article 37 que l'objectif de la mesure est, dans le cadre des engagements internationaux de la France, de renforcer la lutte contre l'" effet de serre " en incitant les entreprises à maîtriser leur consommation de produits énergétiques ; que c'est en fonction de l'adéquation des dispositions critiquées à cet objectif d'intérêt général qu'il convient de répondre aux griefs tirés de la rupture de l'égalité devant l'impôt".
La Haute juridiction poursuit en considérant, "d'une part, que les modalités de calcul de la taxe arrêtées par l'article 37 pourraient conduire à ce qu'une entreprise soit taxée plus fortement qu'une entreprise analogue, alors même qu'elle aurait contribué de façon moindre au rejet de gaz carbonique dans l'atmosphère" ; "d'autre part, qu'il est prévu de soumettre l'électricité à la taxe, alors pourtant qu'en raison de la nature des sources de production de l'électricité en France, la consommation d'électricité contribue très faiblement au rejet de gaz carbonique et permet, par substitution à celle des produits énergétiques fossiles, de lutter contre l'" effet de serre "".
Dans ces conditions, "les différences de traitement qui résulteraient de l'application de la loi ne sont pas en rapport avec l'objectif que s'est assigné le législateur ; les dispositions en cause sont dès lors contraires au principe d'égalité devant l'impôt". Les autres dispositions du I en étant inséparables, il y a lieu, par suite, de déclarer le I de l'article 37 contraire à la Constitution et, par voie de conséquence, ses II et III.
Sur l'article 48
L'article 48 prévoit que les opérateurs autorisés en application des articles L. 33- 1 et L. 34-1 du code des postes et télécommunications "mettent en place et assurent la mise en oeuvre des moyens nécessaires aux interceptions justifiées par les nécessités de la sécurité publique. Les investissements réalisés à cette fin sont à leur charge". Il dispose en outre que "l'Etat participe au financement des charges d'exploitation supportées par les opérateurs pour la mise en oeuvre des moyens nécessaires dans des conditions déterminées par décret en Conseil d'Etat".
Les deux saisines font grief à cet article de mettre à la charge des opérateurs la totalité du coût des investissements nécessaires à la pratique des interceptions, ainsi qu'une partie des charges d'exploitation correspondantes ; ces dispositions rompent donc l'égalité devant les charges publiques.
La Haute juridiction considère que, "s'il est loisible au législateur, dans le respect des libertés constitutionnellement garanties, d'imposer aux opérateurs de réseaux de télécommunications de mettre en place et de faire fonctionner les dispositifs techniques permettant les interceptions justifiées par les nécessités de la sécurité publique, le concours ainsi apporté à la sauvegarde de l'ordre public, dans l'intérêt général de la population, est étranger à l'exploitation des réseaux de télécommunications ; que les dépenses en résultant ne sauraient dès lors, en raison de leur nature, incomber directement aux opérateurs" ; "qu'il résulte de ce qui précède qu'il y a lieu de déclarer contraire à la Constitution la deuxième phrase du deuxième alinéa et le troisième alinéa du I de l'article 48, ainsi que le II du même article ; que demeurent en conséquence applicables les dispositions de l'article L. 35-6 du code des postes et télécommunications aux termes desquelles : " Les prescriptions exigées par la défense et la sécurité publique et les garanties d'une juste rémunération des prestations assurées à ce titre, à la demande de l'Etat, par les opérateurs autorisés en application des articles L. 33-1 et L. 34-1 sont déterminées par leur cahier des charges "".
Sur l'article 64
Aux termes du premier paragraphe du I de l'article 64 : "Les exploitants agricoles installés en Corse et affiliés auprès de la caisse de mutualité sociale agricole de Corse au 1er janvier 2001, dont la viabilité économique de l'exploitation a été démontrée par un audit, qui sont à jour de leurs cotisations sociales se rapportant aux périodes d'activité postérieures au 31 décembre 1998 et qui ont renvoyé à la caisse de mutualité sociale agricole de Corse leur déclaration de revenus professionnels conformément aux dispositions en vigueur, peuvent demander, dans un délai de douze mois à compter de la publication de la présente loi, à la caisse de mutualité sociale agricole de Corse à conclure un plan d'apurement de leurs dettes, antérieures au 1er janvier 1999, relatives aux cotisations patronales de sécurité sociale ainsi qu'aux pénalités et majorations de retard correspondantes. Cette demande entraîne de plein droit une suspension des poursuites engagées par la caisse...

Pour continuer la lecture

SOLLICITEZ VOTRE ESSAI

VLEX uses login cookies to provide you with a better browsing experience. If you click on 'Accept' or continue browsing this site we consider that you accept our cookie policy. ACCEPT