Mémoire en réplique présenté par les députés signataires du recours dirigé contre la loi pour l'égalité des chances

JurisdictionFrance
Publication au Gazette officielJORF n°84 du 8 avril 2006
Date de publication08 avril 2006
CourtCONSEIL CONSTITUTIONNEL
Record NumberJORFTEXT000000243177


Les longues observations présentées par le Gouvernement en défense de la loi dite pour l'égalité des chances, dont l'article 8 organise le « contrat première embauche » (ci-après : CPE), ne peuvent sérieusement convaincre. Elles esquivent, en effet, l'essentiel des questions posées par le recours et feignent d'ignorer la véritable portée de ce dispositif créant un régime discriminatoire, en le banalisant à l'extrême.
Pour autant, le CPE n'est pas tout à fait un contrat de travail à durée indéterminée au sens actuel du code du travail. Il est caractérisé par une période de deux ans qui est loin d'être banale. Le deuxième alinéa du II de l'article 8 de la loi définissant précisément cette période est source de toutes les critiques constitutionnelles formulées par les requérants sur l'absence de protections pour les salariés concernés.
En effet, fondé sur l'arbitraire, sur l'absence de garanties des droits, créateur d'insécurité juridique, le CPE porte ainsi atteinte au droit à l'emploi en menaçant finalement la liberté d'entreprendre. Loin de servir l'objectif annoncé, ce dispositif énonce les conditions d'un certain désordre économique, social et bien entendu juridique.
Sans revenir sur l'ensemble des arguments de leur recours, dont en particulier ceux relatifs aux détournements de procédure commis par le Gouvernement pour faire adopter cet article 8 de la loi, les requérants entendent donc répliquer en précisant certains points parmi les plus importants.


1. Sur la violation du principe d'égalité


Le Gouvernement tente d'abord d'éviter la question juridique en avançant de nombreux chiffres pour placer le débat sur le terrain de l'opportunité. Mais, comme vous l'avez toujours jugé, le rôle du Conseil constitutionnel n'est pas de substituer son appréciation à celle du Parlement ni de jouer les experts économiques.
En réalité, cette stratégie de défense s'explique par l'impossibilité pour le Gouvernement d'établir les critères objectifs, rationnels et justes au regard de l'intérêt général, permettant de traiter différemment les jeunes de moins de 26 ans au regard des principes fondamentaux du droit du travail.
Il ne le peut pas, ne serait-ce qu'à l'aune de votre jurisprudence la plus récente.
Vous avez ainsi admis, nécessairement mais implicitement, à propos du contrat dit « nouvelle embauche » que le régime dérogatoire institué en 2005 se justifiait par le fait qu'il était réservé à de petites entreprises et qu'il fallait, au regard de leur particularité objective, « lever certains freins matériels ou psychologiques » à l'embauche. Le commentaire officiel de cette décision paru sur votre site l'explique abondamment.
En revanche, ce « contrat première embauche » a vocation à s'appliquer dans toutes les entreprises, quelle que soit leur taille - comprenant 30, 500, 1000, 10 000 ou plus encore, salariés - et indépendamment de leur situation économique. Pourtant, en vertu de ce CPE, les salariés pourront être traités différemment en raison du seul critère de l'âge et...

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