Observations du Gouvernement sur la loi portant adaptation de la procédure pénale au droit de l'Union européenne

JurisdictionFrance
Publication au Gazette officielJORF n°0189 du 18 août 2015
Record NumberJORFTEXT000031047082
CourtCONSEIL CONSTITUTIONNEL
Date de publication18 août 2015


Le Conseil constitutionnel a été saisi par plus de soixante sénateurs d'un recours dirigé contre la loi portant adaptation de la procédure pénale au droit de l'Union européenne.
Ce recours appelle, de la part du Gouvernement, les observations suivantes.
I. - Sur la procédure d'adoption
A. - Les sénateurs requérants soutiennent que vingt-huit articles, introduits par amendement en première lecture à l'Assemblée nationale, sont dépourvus de tout lien avec les dispositions figurant dans le projet de loi initial.
B. - Il n'en est rien.
1. Le Gouvernement souhaite, à titre liminaire, indiquer qu'à l'occasion de l'examen d'un projet de loi adaptant les normes applicables dans un domaine de l'action publique aux règles de l'Union européenne, le droit d'amendement doit pouvoir s'exercer à la fois pour permettre de transposer de manière effective l'ensemble des normes communautaires qui s'appliquent à ce domaine mais aussi pour adopter des dispositions en lien avec les dispositions figurant dans le projet de loi initial qui modifient le droit interne qui régit ce domaine.
Tel semble être le sens de la jurisprudence du Conseil constitutionnel avant la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008.
Le Gouvernement constate ainsi que, saisi d'une loi portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine du médicament, le Conseil constitutionnel a censuré les articles 35 et 36 qui modifiaient l'article 52 de la loi n° 2004-806 du 9 août 2004 relative à la politique de santé publique pour fixer les conditions que devaient remplir les personnes souhaitant faire usage du titre de psychothérapeute en jugeant que ces dispositions étaient dépourvues de tout lien avec les dispositions qui figuraient dans le projet de loi. Ce projet de loi comportait vingt-huit articles modifiant le code de la santé publique ou de la propriété intellectuelle pour transposer une directive communautaire et deux articles habilitant le Gouvernement à transposer par ordonnances cinq directives de nature technique (décision n° 2007-549 DC du 19 février 2007).
Mais la loi déférée comprenait également des dispositions relatives au droit du médicament qui n'avaient pas pour objet de transposer des directives (publicité des dons versés par les entreprises pharmaceutiques aux associations de patients, collecte des médicaments inutilisés, contenu d'un accord-cadre négocié entre le comité économique des produits de santé et les laboratoires pharmaceutiques). Elle comprenait même des dispositions fiscales prévoyant un abattement au titre de la contribution sur le chiffre d'affaires pour les dépenses de recherche et de développement dans le domaine pharmaceutique.
Le Conseil constitutionnel n'a pas estimé que ces dispositions étaient dépourvues tout lien avec la loi qui lui était déférée.
Cette jurisprudence n'a pas été remise en cause par la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008 qui a précisé, à l'article 45, que tout amendement est recevable en première lecture dès lors qu'il présente un lien, même indirect, avec le texte déposé ou transmis.
Le Gouvernement constate, d'ailleurs, que telle a été la position du Sénat qui a adopté en première lecture des amendements présentés par le Gouvernement pour assurer la transposition de deux directives dont le délai expire en 2015 mais aussi pour procéder à des ajustements au code de procédure pénale afin d'assurer, comme l'a indiqué le rapporteur du projet de loi, « une entière sécurité juridique à des procédures pénales importantes ».
Les dispositions contestées par les sénateurs requérants répondent expressément à ces nécessités. Elles peuvent être regroupées en six ensembles de dispositions.
2. Une première série de dispositions a pour objectif d'empêcher que des personnes puissent continuer à exercer des activités professionnelles impliquant un contact habituel avec des mineurs lorsqu'elles ont commis des infractions particulièrement graves.
L'article 30 de la loi déférée complète ainsi le code de procédure pénale pour prévoir l'information par le ministère public de l'autorité administrative employant une personne, ou exerçant son contrôle sur un organisme employant une personne ayant des contacts habituels avec des mineurs en cas de poursuites ou de condamnations de cette personne. Il prévoit également que le contrôle judiciaire qui peut être prononcé à son encontre, en application de l'article 138 du code de procédure pénale, puisse comporter l'obligation de ne pas exercer une activité impliquant un contact habituel avec des mineurs.
L'article 31 prévoit que la sanction pénale prévue à l'article L. 212-10 du code du sport s'applique aux personnes qui exercent, à titre bénévole, une activité d'enseignement, d'animation ou d'encadrement d'une activité physique ou sportive auprès de mineurs, en dépit d'une condamnation visée à l'article L. 212-9 du même code ou d'une mesure de suspension.
L'article 32 complète le code de l'éducation pour permettre à l'autorité académique d'interdire l'exercice de sa profession à un chef d'établissement privé du premier degré.
L'article 33 modifie le code de l'action sociale et des familles afin de prévoir qu'une condamnation définitive concernant des infractions sexuelles commises sur des mineurs entraîne l'impossibilité de diriger un établissement, service ou lieu de vie régi par le même code.
Ces trois articles donnent leur plein effet aux dispositions de l'article 30 avec lesquelles ils sont en relation directe et corrigent des insuffisances relevées dans les effets, le champ et les motifs des interdictions d'exercice définies par la loi pour assurer la protection des mineurs.
Les dispositions de l'article 30, relatives à la transmission d'informations, et celles des articles 31 à 33, relatives au régime des interdictions, sont ainsi en lien direct avec les dispositions de l'article 3 du projet de loi initial qui prévoyaient, dans l'article 764-4, la possibilité de suivre et de surveiller l'obligation d'interdiction d'exercer une activité professionnelle ou bénévole impliquant un contact habituel avec des mineurs.
Elles permettent d'ailleurs de mettre en œuvre les mécanismes d'alerte prévus par la directive 2013/55/UE du Parlement européen et du Conseil du 20 novembre 2013 modifiant la directive 2005/36/CE relative à la reconnaissance des qualifications professionnelles pour prévoir des mécanismes d'alerte entre Etats membres s'appliquant notamment aux professionnels exerçant des activités liées à l'éducation des mineurs.
Elles ont donc toute leur place dans la loi déférée.
3. Une deuxième série de dispositions a pour...

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