Observations du Gouvernement sur les recours dirigés contre la loi de financement de la sécurité sociale pour 2013

JurisdictionFrance
Publication au Gazette officielJORF n°0294 du 18 décembre 2012
Record NumberJORFTEXT000026786218
CourtCONSEIL CONSTITUTIONNEL
Date de publication18 décembre 2012



Le Conseil constitutionnel a été saisi, par plus de soixante députés et par plus de soixante sénateurs, de deux recours dirigés contre la loi de financement de la sécurité sociale pour 2013.
Ces recours appellent, de la part du Gouvernement, les observations suivantes.


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I. ― Sur la sincérité de la loi déférée :
Les conditions générales de l'équilibre financier pour 2012 et 2013 ont été définies dans le respect des exigences du principe de sincérité telles qu'elles résultent de la jurisprudence du Conseil constitutionnel (v. notamment 29 juillet 2005, décision n° 2005-519 DC, ct 6).
Au moment de la présentation du projet de loi de financement de la sécurité sociale au conseil des ministres, le 28 septembre 2012, la dernière prévision de croissance du Fonds monétaire international pour 2013, qui avait été publiée à la mi-juillet, était de + 0,8 %, niveau qui correspond très exactement à l'hypothèse retenue par le Gouvernement. Pour tenir compte de la réduction des perspectives de croissance observées depuis l'été 2012, le Gouvernement a, pour l'élaboration des lois financières de fin d'année, abaissé de 0,4 point sa prévision de croissance pour 2013 par rapport aux hypothèses retenues au mois de juillet. L'hypothèse de croissance posée pour 2013 est donc raisonnable.
La prévision retenue est un scénario de reprise progressive et raisonnable de l'activité en France en 2013. La demande mondiale serait plus dynamique qu'en 2012 et permettrait une accélération des exportations. La prévision reste prudente sur l'investissement des entreprises, qui repartirait progressivement, et sur les comportements de stockage, qui ne contribueraient pas à la croissance. La consommation augmenterait un peu, le taux d'épargne retrouvant sa moyenne de long terme après avoir atteint un niveau élevé.
La prévision de demande intérieure est presque identique aux prévisions réalisées au moment de la préparation du PLF en septembre par les 20 organismes du groupe technique de la commission économique de la nation (+ 0,6 % pour le Gouvernement, + 0,5 % pour le groupe technique). La principale différence porte sur la demande mondiale et le commerce extérieur. Or les données douanières, jusqu'aux plus récentes portant sur le mois d'octobre 2012, montrent que le commerce extérieur français résiste à la crise : la balance commerciale s'améliore par rapport à 2011.
La prévision de masse salariale privée est naturellement soumise à des aléas, mais la prévision est équilibrée au vu de l'information disponible. L'emploi est en baisse actuellement. Selon la prévision, ce n'est qu'en 2013 que le secteur marchand recommencerait à créer des emplois salariés, en lien avec la reprise de l'activité. En moyenne annuelle, l'emploi salarié marchand serait stable. L'emploi serait également soutenu par les emplois d'avenir, la montée en charge des contrats de génération et les effets des négociations en cours sur la sécurisation de l'emploi, qui devraient conduire à réduire progressivement le niveau structurel du chômage. La prévision de salaires, quant à elle, prend en compte le ralentissement des salaires depuis le déclenchement de la crise en 2008.
Pour ce qui concerne les années 2014 à 2017, une progression du PIB de 2 % par an n'apparaît pas excessive. C'est, du reste, l'hypothèse qui avait été retenue dans le programme de stabilité présenté en avril 2012. La prévision de croissance retenue aujourd'hui est d'autant plus prudente que l'éventualité d'un rattrapage partiel de l'écart entre la croissance constatée entre 2008 et 2012 et la tendance historique ne peut être écartée.
Par ailleurs, rien n'a été de nature, au cours de la procédure, à remettre en cause les conditions de l'équilibre financier initial et à imposer un ajustement des prévisions initiales. Les révisions des perspectives économiques auxquelles les organismes internationaux et instituts de conjoncture ont pu procéder récemment, notamment le FMI, n'ont pas été suffisamment significatives pour justifier une modification des hypothèses macroéconomiques au cours de la discussion du projet au Parlement. Au demeurant, la première estimation par l'INSEE de la croissance du produit intérieur brut au troisième trimestre 2012 (+ 0,2 %) confirme la bonne tenue de la conjoncture en France.
Depuis le dépôt du projet de loi, le taux de change de l'euro et les prix du pétrole ont très légèrement évolué, dans un sens globalement plus favorable à l'activité ; les marchés actions en France et en Allemagne atteignent des plus hauts niveaux depuis l'été 2011.
Les indicateurs d'enquête sont certes mal orientés, mais il convient de les relativiser au regard des données objectives qui ont montré une résistance de l'activité en France. Ainsi l'activité a connu un rebond de + 0,2 % au troisième trimestre. Il renforce la prévision de croissance pour 2012 et conduit à un acquis de croissance légèrement positif pour 2013. Ce rebond n'avait pas été anticipé par les prévisionnistes, au vu des orientations contrastées des indicateurs d'enquête pour le troisième trimestre. Ainsi, à la fin du mois de septembre et à la fin octobre, les prévisions de l'OCDE et de la Banque de France pour le troisième trimestre s'établissaient à ― 0,1 %, comme la moyenne du Consensus Forecast (au sein duquel la Deutsche Bank tablait même sur un recul de ― 0,3 %), soit une sous-estimation de trois dixièmes de point par rapport à la croissance finalement observée.
On observe d'ailleurs ces derniers mois une légère amélioration des indicateurs d'enquête. Dans le secteur de l'industrie, l'indice PMI de novembre s'établit à 44,5 après 43,7 en octobre et 42,7 en septembre. En octobre, l'indice de climat des affaires de l'INSEE passe à 86 en novembre après 84 en octobre et gagne en particulier trois points dans l'industrie. L'enquête de la Banque de France affiche une relative stabilité en octobre aussi bien dans l'industrie que dans les services.
Il est enfin possible de relever que le crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi, qui a été voté par l'Assemblée nationale, devrait jouer favorablement sur les anticipations et les comportements des entreprises dès 2013, le crédit d'impôt étant assis sur la masse salariale de 2013.
Enfin, si les auteurs du recours critiquent le taux de 2,7 % retenu pour la progression de l'objectif national des dépenses d'assurance maladie en 2013, alors que la Cour des comptes privilégiait davantage une progression à 2,4 % pour atteindre un équilibre des comptes de la branche maladie en 2017, cette considération, qui tend à contester la trajectoire retenue pour la maîtrise des dépenses de santé, est sans influence sur la sincérité des conditions générales de l'équilibre financier pour l'année 2013.
Pour toutes ces raisons, le Gouvernement considère que le grief d'insincérité de la loi déférée ne peut pas être retenu.
II. ― Sur l'article 11 :
A. ― Les députés auteurs du recours critiquent la disposition de cet article instituant un déplafonnement des cotisations d'assurance maladie des indépendants (D du I de l'article 11, modifiant l'article L. 612-4 du code de la sécurité sociale). Ils considèrent que, par ce déplafonnement, le législateur a créé une imposition de toute nature et qu'il aurait donc dû lui-même fixer le taux de la cotisation. Il aurait également méconnu l'égalité entre les salariés et les indépendants en les soumettant à des taux différents.
B. ― Le Gouvernement considère qu'aucun de ces griefs n'est fondé.
En premier lieu, les prélèvements visés par l'article sont des cotisations sociales : ils sont dus par toutes les personnes affiliées au régime social des indépendants et ouvrent droit aux prestations et avantages servis dans le cadre de ce régime obligatoire de sécurité sociale. Il existe donc une contrepartie en termes de droits sociaux propres aux bénéficiaires, ne se confondant pas avec la généralité des citoyens. A cet égard, la mesure de modification de l'assiette que constitue le déplafonnement des cotisations ne modifie pas la nature de ces prélèvements. Ils ne deviennent pas, de ce fait, des « impositions de toutes natures ».
Par conséquent, le législateur pouvait...

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