Observations du Gouvernement sur les recours dirigés contre la loi portant adaptation du droit pénal à l'institution de la Cour pénale internationale

JurisdictionFrance
Publication au Gazette officielJORF n°0183 du 10 août 2010
Record NumberJORFTEXT000022681324
CourtCONSEIL CONSTITUTIONNEL
Date de publication10 août 2010



Le Conseil constitutionnel a été saisi, par plus de soixante députés et plus de soixante sénateurs, de deux recours identiques dirigés contre la loi portant adaptation du droit pénal à l'institution de la Cour pénale internationale.
Ces recours appellent, de la part du Gouvernement, les observations suivantes.


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I. ― Sur les normes de référence applicables


A. ― Les auteurs des saisines font valoir qu'en raison de la mention, à l'article 53-2 de la Constitution, que « La République peut reconnaître la juridiction de la Cour pénale internationale dans les conditions prévues par le traité signé le 18 juillet 1998 », le Conseil constitutionnel devrait accepter de contrôler la conformité de la loi déférée au statut de la cour issu de ce traité.
B. ― Le Gouvernement ne partage pas cette conviction.
1. Le Gouvernement est tout d'abord, sur un plan général, acquis à l'idée qu'un grief tiré du défaut de compatibilité d'une disposition législative avec les engagements internationaux de la France ne saurait être regardé comme un grief d'inconstitutionnalité, conformément aux règles édictées dans la décision n° 74-54 DC du 15 janvier 1975 sur la loi relative à l'interruption volontaire de la grossesse.
Cette position de principe n'est pas affectée par la circonstance que la Constitution fasse référence à une convention internationale à laquelle la France serait partie. La jurisprudence du Conseil constitutionnel rappelle l'absence d'incidence d'une telle mention sur le champ du bloc de constitutionnalité : alors même que le droit de l'Union est mentionné à l'article 88-1 de la Constitution, il ne se trouve pas intégré, en tant que tel, au sein des normes de références du contrôle de constitutionnalité, conformément à ce qu'a rappelé, de manière éclairante, la décision n° 2010-605 DC du 12 mai 2010 sur la loi relative à l'ouverture à la concurrence et à la régulation du secteur des jeux d'argent et de hasard en ligne.
Il n'existe enfin aucune raison de trouver dans l'article 53-2 de la Constitution une exigence identique à celle que le Conseil constitutionnel a tirée de l'article 88-1 de la Constitution quant à la transposition des directives européennes depuis l'intervention de la décision n° 2004-496 DC du 10 juin 2004 sur la loi pour la confiance dans l'économie numérique. L'article 88-1 énonce une obligation de participation à l'Union européenne, dont il est possible de déduire un impératif de transposition d'une fraction du droit dérivé de l'Union. L'article 53-2 n'a pour autre objet que de fournir une base légale expresse à la ratification du traité signé le 18 juillet 1998 après que le Conseil constitutionnel eut décidé, par sa décision n° 98-408 DC du 22 janvier 1999, que l'autorisation de ratifier ce traité exigeait une révision préalable de la Constitution.
Il ressort des travaux préparatoires de la loi constitutionnelle n° 99-568 du 8 juillet 1999, dont est issu l'article 53-2, que la portée de cet article se limitait à lever les trois obstacles précisément identifiés par le Conseil constitutionnel dans sa décision du 22 janvier 1999, à savoir l'atteinte au régime des immunités de certaines autorités publiques, la mise en cause des régimes de prescription et d'amnistie et la reconnaissance au profit du procureur de la Cour pénale internationale de pouvoirs d'enquête sur le territoire national. Le choix, à l'article 53-2, d'une formule globalisante par le législateur constitutionnel ne s'explique que par le souhait de ne pas modifier, dans le détail, les articles de la Constitution affectés par le traité. Il ne s'en déduit aucune volonté de distinguer ce dernier au sein du droit international ou de lui reconnaître un statut particulier dans le cadre du contrôle exercé sur le fondement de l'article 61 et, aujourd'hui également 61-1, de la Constitution.
Le Gouvernement est ainsi d'avis qu'aucune raison n'implique d'intégrer le statut de la cour au sein des normes de référence du contrôle de constitutionnalité. Cela a pour effet de rendre inopérants l'essentiel des griefs invoqués dans les saisines.
2. Le Gouvernement souhaite faire observer qu'en tout état de cause, il n'est pas possible d'inférer du statut, et notamment pas de son article 1er, l'exigence de transposition qu'y trouvent les auteurs des saisines.
La seule obligation juridique d'adaptation des législations internes des Etats parties découlant du statut est énoncée à son article 86, qui prévoit une obligation de coopération...

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