Rapport au Président de la République relatif à l'ordonnance n° 2014-326 du 12 mars 2014 portant réforme de la prévention des difficultés des entreprises et des procédures collectives

JurisdictionFrance
Publication au Gazette officielJORF n°0062 du 14 mars 2014
ELIhttps://www.legifrance.gouv.fr/eli/rapport/2014/3/14/JUSX1401954P/jo/texte
Date de publication14 mars 2014
CourtMinistère de la justice
Record NumberJORFTEXT000028719984



Monsieur le Président de la République,
La loi n° 2005-845 du 26 juillet 2005 de sauvegarde des entreprises, modifiée notamment par l'ordonnance n° 2008-1345 du 18 décembre 2008 portant réforme du droit des entreprises en difficulté et la loi n° 2010-1249 du 22 octobre 2010 de régulation bancaire et financière, a institué la procédure de sauvegarde qui, comme les procédures de redressement judiciaire et de liquidation judiciaire, est une procédure collective. Mais la condition d'ouverture de ces deux dernières procédures est le constat d'une cessation des paiements, ce qui n'est pas le cas de la procédure de sauvegarde, pour laquelle l'objectif de la loi était de renforcer les chances de redressement en évitant une dégradation de la situation de l'entreprise. A cet égard, la procédure de sauvegarde répond aux mêmes préoccupations d'anticipation que la procédure de conciliation ou le mandat ad hoc. Dans ces différentes procédures, les textes précités ont ouvert la voie d'une solution négociée avec les créanciers, soit sur la base d'un accord soit sur celle d'un vote. Mais le législateur s'était également attaché au traitement rapide des procédures de liquidation judiciaire.
En présentant, le 6 novembre 2012, le Pacte national pour la croissance, la compétitivité et l'emploi, le Gouvernement n'a pas remis en cause ces orientations. Tant les réponses faites au questionnaire diffusé en décembre 2012 par le ministère de la justice que les réflexions des groupes de travail mis en place en mars 2013 par la garde des sceaux ont fait état de l'intérêt de les conserver et de poursuivre les mêmes objectifs généraux.
L'ordonnance a été élaborée sur le fondement de ces orientations et a fait l'objet d'une consultation publique le 20 décembre 2013. Elle est prise sur le fondement de l'article 2 de la loi n° 2014-1 du 2 janvier 2014 habilitant le Gouvernement à simplifier et sécuriser la vie des entreprises.
L'ordonnance modifie essentiellement le code de commerce, mais elle comporte également des dispositions touchant au code civil, au code général des impôts, au code rural et de la pêche maritime, ou encore au code du travail. Elle est organisée par code et suit à chaque fois le plan du code concerné.
Elle peut cependant être présentée en fonction des principaux objectifs qu'elle poursuit, qui sont de faciliter l'anticipation de l'aggravation des difficultés, de renforcer l'efficacité des procédures en adaptant leurs effets à l'égard des créanciers, du débiteur et des associés ainsi que le rôle dévolu à ceux-ci, d'adapter le traitement des situations irrémédiablement compromises à la réalité en respectant à la fois les droits des créanciers et ceux du débiteur, et d'améliorer les règles de procédure pour plus de sécurité, de simplicité et d'efficacité.


I. ― Favoriser l'anticipation de l'aggravation
des difficultés


Pour faciliter et rendre plus efficaces les démarches d'anticipation, l'ordonnance modifie le titre Ier du livre VI du code de commerce. Elle prolonge également la voie ouverte par la loi du 22 octobre 2010 qui avait institué la procédure de sauvegarde financière accélérée. Elle modifie, avec le même objectif, un certain nombre de dispositions concernant la sauvegarde.


I-1. ― La prévention


Tirant les enseignements de la pratique, tout en conservant les caractéristiques essentielles du mandat ad hoc et de la conciliation, l'ordonnance s'attache également aux procédures d'alerte reposant sur le rôle du président du tribunal.
L'article 2 attribue au président du tribunal de grande instance un rôle comparable à celui du président du tribunal de commerce puisqu'il pourra également convoquer les débiteurs relevant de sa compétence et obtenir communication d'un certain nombre d'informations. Toutefois, lorsque l'activité en cause sera celle d'un auxiliaire de justice, la nécessité de préserver l'indépendance de ces professionnels a conduit à retenir la solution d'une information de l'ordre professionnel concerné ou de l'autorité compétente par le président qui ne pourra alors convoquer l'intéressé ni, de ce fait, exercer ses pouvoirs d'investigation.
Plusieurs dispositions modifient les textes applicables au mandat ad hoc en veillant à conserver la souplesse propre à cette mesure. L'article 3 prévoit une information du commissaire aux comptes en cas de désignation d'un mandataire ad hoc. Par ailleurs, l'article 13 prévoit que la rémunération du mandataire ad hoc sera portée à la connaissance du ministère public, sans toutefois attribuer à ce dernier de nouvelles prérogatives procédurales, et écarte certaines modalités de détermination de cette rémunération.
L'article 13, qui modifie l'article L. 611-14 du code de commerce, concerne également la rémunération du conciliateur pour lequel il est de surcroît prévu une intervention du ministère public au moment où le président du tribunal la fixe.
Outre ces dispositions et celles précisant les prérogatives du président du tribunal en matière d'information (art. 4 modifiant l'article L. 611-6), les modifications apportées au titre Ier du code de commerce relatives à la conciliation ont pour objectifs, d'une part, de faciliter le recours par le débiteur à cette procédure préventive, d'autre part, d'inciter les créanciers à participer activement aux négociations.
C'est ainsi que l'article 14 introduit un nouvel article L. 611-16 qui prévoit que sont réputées non écrites les clauses modifiant, en défaveur du débiteur qui recourt à une mesure ou procédure préventive, les conditions d'exécution d'un contrat en cours, ainsi que celles faisant peser exclusivement sur celui-ci la charge financière de l'intervention, dans ce cadre, de conseils assistant le créancier participant. De même, l'article L. 611-7 est modifié pour permettre au juge de la conciliation d'accorder des délais de grâce même lorsque la mise en demeure n'est pas intervenue au cours de la procédure de conciliation ; ce même juge pourra toutefois, ainsi que le souligne la nouvelle rédaction de ce texte, subordonner la durée de ces délais à la conclusion effective de l'accord (art. 5 de l'ordonnance). Des délais de grâce peuvent également être accordés, comme le prévoit l'article 8, pendant la durée de l'exécution de l'accord en considération de celui-ci. Il s'agit de mesures accordées au cas par cas, pour une durée maximale de deux ans, et non d'un substitut à un plan imposé. Contrairement aux délais accordés pendant la phase de négociation, ces délais accordés pendant l'exécution du plan ne profitent pas aux garants par des dispositions dérogatoires. Mais leur sort peut également être lié à la bonne exécution du plan (art. 10). Le même article 8 fait obstacle à l'alourdissement des charges financières résultant de la capitalisation des intérêts.
L'accompagnement des efforts du débiteur par les créanciers permet à ceux-ci, lorsqu'ils répondent aux critères de l'article L. 611-11, de bénéficier d'un privilège, dit de conciliation. L'article 11 élargit le champ de cet avantage, dont il était discuté de savoir s'il pouvait jouer en cas de plan de sauvegarde ou de redressement arrêté dans une procédure collective postérieure. L'article L. 626-20 est modifié par l'article 40 de l'ordonnance pour trancher cette controverse en faveur de ces créances nées avant l'ouverture de la procédure collective en précisant que le tribunal ne peut leur imposer de délais de paiement. L'article 40 ne fait pas obstacle à ce que les créanciers auxquels ne peuvent être imposés des délais ou des remises acceptent d'en accorder.
L'intérêt commun du débiteur et des créanciers pouvant être la recherche d'une solution sous la forme d'une cession de tout ou partie de l'entreprise, l'article 5, modifiant l'article L. 611-7, consacre la possibilité de confier au conciliateur la mission de rechercher un éventuel repreneur, et l'article 70 renforce l'effectivité de cette mission lorsque la cession interviendra dans le cadre d'une procédure collective suivant la procédure de conciliation, puisque le tribunal pourra estimer suffisantes les recherches faites pendant celle-ci. Cet intérêt commun peut également conduire à la désignation d'un mandataire de justice chargé de suivre l'exécution de l'accord, constaté ou homologué, mesure à laquelle la pratique a déjà recouru, ce qu'organisent les articles 6, 8 et 13, l'article 12 modifiant par ailleurs l'article L. 611-13, relatif aux incompatibilités, pour prendre en compte cette mission de mandataire à l'exécution de l'accord.
Dans le cadre de la procédure préventive, le rôle du ministère public est ponctuellement renforcé (art. 5 [4°] et 13) afin de conserver à celle-ci son caractère souple et consensuel, tout en veillant aux excès possibles. La chronologie de l'information des salariés est clarifiée.


I-2. ― Le règlement amiable agricole


Le code rural et de la pêche maritime est modifié par les articles 102 à 107. Les dispositions relatives au règlement amiable agricole instituées au profit des débiteurs, exploitants agricoles, qui ne peuvent invoquer le bénéfice de la procédure de conciliation du code de commerce, sont ainsi rapprochées de cette dernière procédure tout en conservant les...

Pour continuer la lecture

SOLLICITEZ VOTRE ESSAI

VLEX uses login cookies to provide you with a better browsing experience. If you click on 'Accept' or continue browsing this site we consider that you accept our cookie policy. ACCEPT