Saisine du Conseil constitutionnel en date du 21 décembre 2007 présentée par au moins soixante députés, en application de l'article 61, alinéa 2, de la Constitution, et visée dans la décision n° 2007-561 DC

JurisdictionFrance
Publication au Gazette officielJORF n°0018 du 22 janvier 2008
Record NumberJORFTEXT000017942353
CourtCONSEIL CONSTITUTIONNEL
Date de publication22 janvier 2008

LOI RATIFIANT L'ORDONNANCE N° 2007-329 DU 12 MARS 2007
RELATIVE AU CODE DU TRAVAIL (PARTIE LÉGISLATIVE)

Monsieur le président du Conseil constitutionnel, mesdames et monsieurs les membres du Conseil constitutionnel, nous avons l'honneur de vous déférer, conformément au deuxième alinéa de l'article 61 de la Constitution, l'ensemble de la loi ratifiant l'ordonnance n° 2007-329 du 12 mars 2007 relative au code du travail (partie législative).
A l'appui de cette saisine, nous développons les griefs suivants.

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Conformément aux dispositions de l'article 38 de la Constitution, l'article 84 de la loi n° 2004-1343 du 19 décembre 2004 de simplification du droit a habilité le Gouvernement à adapter par ordonnance la partie législative du code du travail.L'article 92 de cette même loi fixait un délai de dix-huit mois pour la promulgation de cette ordonnance.
Ce délai s'étant avéré insuffisant, l'article 57 de la loi n° 2006-1770 du 30 décembre 2006 pour le développement de la participation et de l'actionnariat salarié et portant diverses dispositions d'ordre économique et social a, dans son I, autorisé de nouveau le Gouvernement à procéder par ordonnance pour adapter les dispositions législatives du code du travail. Le législateur a cru bon alors indiquer que cette adaptation devait se faire à droit constant, afin d'y inclure les dispositions de nature législative qui n'ont pas été codifiées, d'améliorer le plan du code et de remédier, le cas échéant, aux erreurs ou insuffisances de codification .
L'autorisation du législateur était à cette occasion strictement définie grâce au rappel de l'obligation d'une codification à droit constant et pour un délai supplémentaire de neuf mois.C'est dans ces conditions qu'est parue au Journal officiel du 13 mars 2007 l'ordonnance n° 2007-329 du 12 mars 2007 relative au code du travail, que la loi déférée propose de ratifier.
Les auteurs de la saisine entendent préciser que la procédure de codification par voie d'ordonnance suite à l'habilitation donnée par le législateur peut être un objectif partagé dès lors qu'elle répond aux exigences de la matière à savoir le double respect des principes de codification à droit constant et des principes constitutionnels de sécurité juridique, de lisibilité et d'intelligibilité de la loi. En l'espèce, la ratification de l'ordonnance du 12 mars 2007 n'a pas pour simple objet de respecter l'article 38 de la Constitution et de permettre au législateur d'ajuster les dispositions soumises à ratification. Le rapport de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales de l'Assemblée nationale (n° 436, page 5) indique en effet que l'intérêt d'une loi de ratification est aussi de rendre sans objet les recours engagés devant la juridiction administrative contre cette ordonnance en donnant une valeur législative à l'ordonnance qu'elle ratifie .
Cette intention clairement revendiquée du législateur donne un sens particulier à l'avant-propos, rédigé par M. Christophe Radé, professeur à l'université de Bordeaux, du code Dalloz de la nouvelle partie législative du code du travail : Il est aujourd'hui trop tôt pour déterminer l'impact de cette recodification sur le droit du travail. Même si on peut raisonnablement penser que dans l'immense majorité des cas la réécriture de certaines dispositions jugées obsolètes, la scission des articles les plus volumineux et le regroupement des dispositions jusque-là éparses ne devraient pas modifier leur interprétation, plusieurs mois, voire plusieurs années, seront sans doute nécessaires pour que ce nouveau code révèle tous ses secrets.
Outre le fait que la nouvelle partie législative du code du travail soit publiée avant que le Parlement n'ait définitivement adopté la loi de ratification de l'ordonnance du 12 mars 2007, cette citation laisse perplexe quant aux exigences constitutionnelles de lisibilité et d'intelligibilité que doit respecter la loi ratifiant l'ordonnance de codification de la partie législative du code du travail.
La codification étant censée améliorer l'accessibilité et la lisibilité du droit, il semble pour le moins paradoxal de lire qu'en l'espèce, il faudra attendre des mois, voire des années, pour que le nouveau code ne soit plus un secret pour les salariés et les employeurs, les organisations syndicales et les représentants du personnel, les inspecteurs du travail et les conseillers prud'homaux.
Elle laisse également perplexe quant au respect d'une codification à droit constant, et au-delà du respect des articles 34 et 37 de la Constitution, dans la mesure où il apparaît que dans certains cas, l'interprétation des nouveaux articles du code du travail pourra être modifiée.
Pour dénoncer ce double manquement, les auteurs de la saisine recommandent la lecture d'articles de doctrine, celui du professeur Emmanuel Dockès, professeur à l'université de Lyon, paru dans la Revue de droit social en avril 2007, celui du professeur Bernard Teyssié, professeur à l'université Panthéon-Assas, paru dans la Semaine juridique en mars 2007, ou encore celui d'Alexandre Fabre, docteur en droit, et Manuela Grevy, maître de conférences à l'université Paris-I, publié dans la Revue du droit du travail.
Ces articles très sévères sur l'ordonnance de codification sont révélateurs de ces manquements aux exigences constitutionnelles. Plusieurs dispositions d'ordre législatif de l'ancien code ne se trouvent plus dans la nouvelle partie législative.D'autres dispositions sont déplacées vers d'autres codes. Enfin, de nombreuses dispositions législatives sont déclassées en dispositions réglementaires.
L'autorisation du législateur pour une codification à droit constant n'est pas, loin s'en faut, scrupuleusement respectée. Ce sont bien les principes de sécurité juridique, les exigences constitutionnelles...

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